Actualités

La lettre 28 – Décembre 2021

21 12 2021

DÉCOUVRIR SON PASSÉ PERMET-IL D’EN ÊTRE LIBRE ?

REGARD DE TROIS PSYCHANALYSTES CORPORELLES

 

NOTRE VRAIE LIBERTE

Après une conférence, il nous est souvent demandé: « Mais alors quand on a revécu tout cela on est libéré ? » et derrière cette question nous pouvons percevoir l’espoir de se débarrasser définitivement de ce qui entrave notre vie quotidienne. Intuitivement chacun sent qu’il est le fruit de comportements mis en place dans l’enfance et qu’il les répète. Pendant tout un temps, nous  cherchons à nous en libérer et au fond à nous changer.

Revivre ses traumatismes en psychanalyse corporelle conduit à se connaître et à vivre un état profond de miséricorde pour soi et pour tous les protagonistes de l’histoire. Depuis cette connaissance et cet amour, nous ne nous changeons pas mais nous avons accès à un accueil tendre de notre personne. Cela nous permet ensuite de nous ouvrir à d’autres possibles, libres ponctuellement du passé.

L’instant d’après tout sera à reconquérir… Ah quel drame pour ce petit ego ! «Non… Il faut recommencer ? » Eh bien oui et quoi de plus naturel… Nous sommes ainsi faits, structurés par des schémas répétitifs qui ont l’énorme avantage de définir notre personnalité de façon stable.

D’un autre point de vue, en nous reconnaissant ainsi, nous avons à chaque fois une nouvelle chance de nous accueillir et de nous ouvrir au Nouveau, c’est-à-dire à ce qui existe en dehors de ces comportements répétitifs.

Tiens ? Mais ne s’agit-il pas là d’une façon de vivre dans l’Instant ? Ce fameux Instant présent où tout est libre, vibrant, neuf et qui nous échappe si vite ?

Voilà notre nouvelle liberté qui pointe le bout de son nez. Elle est portée par l’amour et disparaît aussi vite qu’elle est apparue. Son goût est si délicieux que nous sommes légion à la chercher depuis des millénaires que cela soit par l’ascèse, la méditation, la prière… ou par une connaissance profonde de soi accompagnée d’une pratique au quotidien.

Au lieu de nous désespérer de sa fugacité, puissions-nous nous réjouir qu’elle soit accessible à chaque douleur pour que précisément l’Instant présent reste libre, inconnu, nouveau, inaliénable à notre Ego.

Cette nouvelle liberté ne fait jamais grand bruit. Point de coup d’éclat, de grands discours… C’est un monde d’humilité que celui d’apprendre à s’accueillir dans ses faiblesses. Oups ! Encore une difficulté pour l’Ego. Mais la psychanalyse corporelle nous y prépare par son rythme. L’histoire se révèle de séance en séance et là encore ce n’est pas notre volonté qui décide à elle seule.

Libre dans un instant de mon traumatisme, je m’ouvre à des solutions que j’étais incapable d’apercevoir avant ce passage par la petite porte secrète de la miséricorde.

C’est depuis l’histoire reconnue et accueillie que la transformation devient possible.

Sylvie Regnault 

 

 

LIBRE DU PASSÉ, RECHOISIR LA PAIX

Malgré mes doutes par rapport à l’efficacité du vaccin contre le corona virus, ma décision est prise : je vais me faire vacciner pour pouvoir aller voir mon papa de 93 ans qui réside en Suisse. Impossible de le rencontrer sans faire une quarantaine, je ne peux y échapper !

Plus le rendez-vous approche, plus je sens un malaise m’envahir : j’ai le sentiment d’aller me soumettre à une règle incohérente et ça m’est insupportable !

Un souvenir de petite fille vient m’éclairer : j’ai sept ans et j’apprends les règles grammaticales. Je n’y comprends rien, quel est le sens de tout cela ? La maîtresse nous fait faire une dictée et je suis tout à fait capable de faire « un sans-faute » même si je trouve cela débile cette grammaire !

Je décide de tester l’institutrice, elle dicte une phrase qui se termine évidemment par un point et la prochaine commence donc par une majuscule. Je ne mets pas de point donc pas de majuscule pour la suite. Evidemment, je suis pénalisée pour cette faute. Et c’est là où tout se joue, je vais près de ma maîtresse, et je lui montre que je n’ai pas mis de point donc pas de majuscule, logique, non ? Ce que j’attends d’elle à ce moment-là c’est qu’elle me donne le sens de cette règle grammaticale, en quoi celle-ci joue un rôle fondamental à la compréhension du texte et bien sûr qu’elle reconnaisse aussi ma vivacité d’esprit. Pas du tout, elle assoit son autorité et s’en tient à la règle pure – « il faut faire comme cela et c’est tout ! » Je reste pénalisée et l’avenir de ma vie d’écolière se dessine, je la passerais à regarder les nuages dans le ciel et à faire semblant d’étudier.

Mon regard d’adulte se tourne vers ma maîtresse. Je rencontre une femme qui a toujours été une bonne élève, jamais elle n’a remis en question ce qu’on lui enseignait. Ce cadre la sécurisait et lui permettait de mettre sous le tapis un ensemble d’émotions dont elle ne savait que faire. Elle enseigne aussi comme elle a été enseignée.

Elle ne pouvait répondre à ma demande sans que son équilibre vacille. Que j’ose remettre en question son enseignement lui était insupportable ! Il fallait absolument que je me conforme et suive son exemple en obéissant strictement aux règles sans réfléchir, seule manière pour  elle de trouver une stabilité.

Sans ce regard attendri sur mon enseignante et la petite fille que j’ai été, sans une réconciliation profonde avec ce moment de ma vie, je serais allée me faire vacciner de la même manière que la petite fille –« je vais les tester en faisant en sorte d’avoir des symptômes, qui mettent ma santé en danger, pour prouver à ceux qui me l’imposent, que ce vaccin n’est pas encore prêt à être inoculé et pour souligner le manque de cohérence de leurs propos ! »

Je me suis sentie libre alors de ce scénario que j’allais inévitablement mettre en place. C’est en paix et confiante que je me suis fait vacciner. J’ai pu voir mon papa tranquillement comme je le désirais profondément.

Séverine Matteuzzi

 

LIBRE DE SON PASSÉ ? `

Au cours de mon parcours et de ma quête intérieure, j’ai souvent entendu cette phrase « être libre de son passé » ou se « libérer de son passé » aussi bien dans les parcours thérapeutiques que j’ai pu suivre que dans les différentes voies spirituelles que j’ai approchées.  Mais qu’est-ce que cela peut bien signifier concrètement ? S’agit-il d’un oubli du passé, de son effacement, d’une coupure ? Tout cela a été longtemps abstrait et sans réponse.

Aujourd’hui, grâce à ma cure de psychanalyse corporelle que j’ai finie il y a bientôt deux ans, j’ai acquis des repères intérieurs face à cette liberté par rapport au passé.

La paix retrouvée dans mon traumatisme de la naissance me rend plus libre quant à ma quête identitaire. Je réalise que peu importe qui sont mes parents, je suis quelqu’un d’unique avec des qualités, des forces et des fragilités propres. Depuis cette identité d’être je peux à ma mesure aider la vie et la souffrance des autres.

Me rappeler par la pratique régulière la détresse de la toute petite fille qui se vit comme une faute suite au traumatisme de la petite enfance, me permet de lui sourire et de m’accueillir. De cet endroit je me sens plus libre.

La paix retrouvée dans mon traumatisme de l’enfance me rend plus libre dans ma vie de femme et dans ma vie sexuelle. Aujourd’hui, je suis plus à l’aise dans mon corps et moins bloquée par la honte. Quand le blocage revient, l’intime conviction qu’il est relié à mon passé, m’aide à le dépasser plus vite. En cela mon degré de liberté, là encore, grandit.
Et enfin la paix retrouvée dans mon traumatisme de l’adolescence m’a rendue plus libre dans mon rapport aux idéaux qui m’animent, en particulier vis-à-vis de la Foi. J’ai longtemps cru que je devais renoncer à mes idéaux pour me conformer à la réalité et aux autres. J’ai aujourd’hui le choix entre me contenter de rêver ma vie ou tenter de matérialiser mes rêves.

Concrètement, de façon persistante, je me sens en paix avec ma famille, avec mes origines. Pour l’avoir profondément vécue à la fin de chacune des 4 scènes traumatiques, cette paix me procure une tranquillité intérieure qui me rend disponible à mon présent et à mon devenir.

Pour vivre plus libre de mon passé, il a fallu que je le connaisse. La psychanalyse corporelle s’est avérée être un puissant outil de connaissance de mon passé.

Daniéla Litoiu

  

Archivage des articles parus dans les lettres précédentes à la page Presse

Partager

Articles pouvant vous intéresser

Voir tous les articles

Où en est la psychanalyse ?

15 10 2020

Un dossier complet de la Revue Reflets est consacrée à la psychanalyse. A lire pour en comprendre l'évolution. Articles à consulter et acheter sur le site https://revue-reflets.org/produit/revue-reflets-37/

INFO-LETTRE – SEPTEMBRE 2020

01 09 2020

  Edito En juillet dernier, le bureau de l'IFPC a élu un nouveau président à la tête de l'Institut, Jean-Marie Montagut. Nous l'avons interrogé sur ses objectifs. Je suis particulièrement…

La lettre 23 – Mars 2020

01 03 2020

Au sommaire : Editorial : vers une culture du pardon Un certain Regard : revécu de naissance en psychanalyse corporelle; témoignage.   EDITORIAL Vers une culture du pardon ?... Lutte…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *